Ma soirée du Nouvel An, par Christine Bourrelly

Une nouvelle écrite pour le Zodiac Challenge 2019.

Nouméa, 31 décembre 2018.
Mes patrons ont fermé le restaurant par sécurité après le service du midi. Ici, à la BD, la Baie des Citrons, les soirées de fête peuvent vite dégénérer. Beaucoup d’alcool, des bandes qui se retrouvent et qui finissent la nuit sur la plage. Il n’en faut pas beaucoup pour qu’une altercation dégénère.
Je ne sais pas vraiment où aller. Arrivé depuis six semaines sur le Caillou, je ne connais pas encore grand monde. J’ai mes repères en bord de mer, mais pas de compagnie aujourd’hui.
Je vis en colocation dans le quartier du Trianon. Mes colocs sont tous sympas, mais ce soir Marie est avec sa famille venue pour les fêtes, James a pris une semaine de vacances en Australie, et Alex, qui est infirmier aux urgences, travaille de nuit. Mes collègues du restaurant sont partis faire la fête en brousse. Je n’ai pas encore de voiture — tout est tellement cher ici —, alors je crois que je vais rester dans le coin et que je rentrerai à pied.
J’ai mangé une glace au glacier italien. Délicieuse, mais au prix d’un repas en métropole. Elle me reste un peu sur l’estomac. Économiser pour la voiture, ça va être un peu long…
J’ai fait une sieste à l’ombre d’un cocotier sur la plage. Prévoyant, j’ai toujours avec moi mon sac à dos avec maillot, serviette et crème solaire. Ici, la couche d’ozone est fine, on devient vite écarlate.
Je ne sais pas ce que je vais faire de la soirée. Peut-être que j’irai boire une bière et manger un bout à coté, aux 3 Brasseurs. À 20 000 kilomètres de chez moi, je bois et mange la même chose que dans ma brasserie du Vieux Lille. Un welsch-frites ou une flammekueche, ce n’est pas vraiment dépaysant… mais c’est bon !
Il fait chaud. C’est l’été ici. Je me décide pour la traversée à la nage jusqu’à l’île aux Canards. Il doit y avoir un gros kilomètre, ça va m’occuper. Je n’ai pas d’idée d’autres choses à faire. Autant m’entretenir. Aujourd’hui, il n’y a pas trop de vent et pas mal de touristes, des Australiens et des Asiatiques descendus des bateaux de croisière. À mon avis, la navette me prendra au retour sans me faire payer, je me mélangerai au groupe. De toute manière, je n’aurai pas un sou sur moi, puisque je vais planquer mes affaires entre deux rochers avant de plonger.
La navette m’a bien ramené. Je suis assis sur mon rocher. Là où j’avais laissé mes affaires. Derrière moi, j’entends les musiques des différents restaurants qui s’entremêlent. C’est la fête pour certains. Maintenant qu’il fait nuit, j’attends que le soleil se lève.
Un jeune, déjà bien saoul s’approche et me propose une bière. J’accepte. En maillot de bain, sans chaussures, sans téléphone, sans clés et sans mes papiers qui ont disparu, je ne dois pas avoir l’air très joyeux. Alors, ce gars bourré qui m’offre un peu d’humanité et d’espoir, je prends !
Je lui souris, claque ma cannette contre la sienne et, éclate de rire en regardant les étoiles : « Bienvenue 2019 ! ».

 

 

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